Nature du risque

Nature du risque

Le sol est un système complexe, où vit une biomasse considérable; il est composé d'une phase liquide, une phase solide et une phase gazeuse.  Le devenir des polluants dans le sol dépend donc

- des échanges entre la phase solide immobile et les phases gazeuses et aqueuses mobiles

- du déplacement des phases mobiles

- de transfert vers la biomasse

 

Pour prévoir le comportement des polluants dans le sol, il faut connaître

- sa porosité

- sa densité

- sa composition granulométrique

- son pH

- son potentiel rédox

- sa teneur en carbone organique

- sa capacité d'échange cationique (CEC)

(la CEC  mesure la taille du complexe argilo-humique. Elle varie en fonction du taux et du type d’argile et d’humus rencontrés. Elle permet d’apprécier l’intensité de la fixation des éléments nutritifs sur le CAH. Plus la CEC est élevée, plus les éléments sont retenus sur les particules du sol)

  

En fonction de ces caractéristiques, les polluants seront dégradés ou non, immobilisés ou bien transférés aux autres compartiments de l'écosystème : l'eau, l'atmosphère ou la biomasse. La nature du sol conditionne donc en partie le risque de pollution des eaux souterraines et superficielles.

 

Le danger pour les organismes vivants concerne

 

1°) les végétaux

Le transfert des polluants dans les plantes conduit

-        d'une part à une phytotoxicité

Au delà de seuils variables selon les éléments, la présence de métaux est néfaste à la croissance végétale. Pour le chrome, les essais réalisés sur l’orge ou le ray-grass font état d’une LOEL (lowest observed effect dose) pour la croissance végétale d'environ 50 ppm (50 mg/kg MS). Le nickel devient phytotoxique pour les espèces les plus sensibles à partir d’une concentration moyenne du même ordre. 

-        d'autre part à une contamination de l'alimentation des herbivores

Pour les polluants minéraux, l'importance de l'absorption racinaire dépend de la forme chimique de l'élément : certains sels ou oxydes sont bien absorbés, d’autres moins. Pour les polluants organiques, l'absorption est un phénomène passif fonction de la polarité des molécules. La translocation depuis les racines jusqu'aux parties aériennes est corrélée aux valeurs du Kow : les polluants très lipophiles restent adsorbés sur les racines avec une très faible mobilisation à l'intérieur de la plante.

Les plantes peuvent donc bioconcentrer un certain nombre de polluants minéraux ou organiques. Les espèces végétales avec une forte capacité de bioconcentration sont potentiellement intéressantes pour extraire les polluants et décontaminer les sites. Mais la biomasse restant relativement faible, l'intérêt pratique est malheureusement limité.

 

2°) la microflore

L'action néfaste des polluants sur la microflore du sol peut être lourd de conséquences. En effet, les microorganismes sont les principaux acteurs de la minéralisation de la matière organique et du recyclage des éléments. Ils conditionnent donc en grande partie sa fertilité. D'autre part, ils permettent également la dégradation des contaminants organiques et protègent donc l'ensemble de l'écosystème contre leurs effets néfastes. Par ailleurs ils peuvent servir de bioindicateurs pour contrôler l'importance de la pollution.

On cherche donc à développer les tests permettant de refléter l’étendue et l'impact de la pollution et de chiffrer son importance.

On peut d'abord mesurer l'importance de la microflore globale, par diverses méthodes :

-        mesure de la biomasse

-        mesure de l'activité respiratoire

-        mesure de la minéralisation de l'azote

-        mesure de l'activité de diverses enzymes microbiennes…

 

Mais le danger des polluants est davantage dans leur capacité de modifier la structure des peuplements de microoganismes que de réduire globalement leur nombre. C'est pourquoi il est plus intéressant de mettre au point des méthodes permettant de mesurer la diversité microbienne. Elles reposent sur

- la reconnaissance directe des espèces

Pour les espèces cultivables

- le ribotypage et l'établissement d'empreintes génétiques

Traçage des individus par leur ARNm

- l'établissement d'empreintes chimiques

Les acides gras des phospholipides (PLFA) sont caractéristiques d'une communauté microbienne; on détermine donc le "profil PFLA"

- l'empreinte métabolique

Le profil d'utilisation des substrats carbonés reflète le nombre d'espèces présentes et actives.

 

3°) les espèces animales

Les espèces endogées et épigées sont exposées d'une part par contact direct, d'autre part par consommation de terre et d'aliments contaminés.

Le risque pour les espèces animales est lié à l'évolution spatio-temporelle des individus. Les espèces inféodées au site (ex ver de terre) sont plus exposées que celles ne le fréquentant qu'épisodiquement. C'est donc une espèce-test d'intérêt.

 Eisenia andrei

 Conc dans le sol

CL50

700 ppm

LOEC croissance

200 à 500 ppm

Ex : Ordre de grandeur des résultats des essais d’écotoxicité du nickel pour le ver de terre (Eisenia fetida)

 

Chez les animaux domestiques et l'Homme, la résorption intestinale des métaux dits "lourds" est dans l'ensemble faible s'ils sont présents sous forme inorganique.

La forme chimique est déterminante. Ainsi dans le cas du chrome, CrIII est très peu absorbé (En moyenne 0,5 à 0,7 % chez l’Homme) alors que Cr VI est mieux absorbé (mais il est réduit en CrIII dans l’intestin). La fraction résorbée diffuse dans tout l’organisme, l’élimination se fait par l’urine et les fécès.

Le chrome s’accumule donc peu dans les denrées d’origine animale

FBC foie

FBC rein

FBC muscle

0,022

0,017

0,026

Facteurs de bioconcentration (FBC) du chrome mesuré chez les bovins ayant reçu

des fourrages contaminés par des boues liquides