Eutrophisation
Un lac sain est dit oligotrophe: il est riche en oxygène et contient peu de matières nutritives en solution ou en suspension. Il reçoit un apport d'éléments nutritifs par érosion du bassin versant, qui, très progressivement, favorisent le développement du phytoplancton et des plantes aquatiques qui sédimentent; petit à petit, le lac se comble et disparaît, mais c'est un processus qui s'accomplit à l'échelle des temps géologiques; c'est le "vieillissement naturel".
Un apport excessif de matières organiques fermentescibles, ainsi que de nitrates et de phosphates, lié au rejet d'égouts mal ou non épurés (N03- des déjections et P04--des lessives) ou bien aux eaux résiduaires domestiques ou de diverses industries, (comme les papeteries, les laiteries ... ) accélère considérablement l'eutrophisation, et on devrait plutôt parler de dystrophisation:
® En milieu lentique (eaux calmes: lacs, étangs ... ), on assiste à l'envasement progressif de l'étendue d'eau.
® En milieu lotique (eaux courantes), il y a disparition des espèces de poissons ou d'invertébrés d'eau pure dans la zone septique (celle directement polluée par les matières organiques et sels minéraux, où pullulent les microorganismes saprophytes) et au fur et à mesure que l'on s'éloigne du point de rejet, réapparition progressive des différentes espèces animales et végétales.
En eau douce, c'est l'apport excessif de phosphates qui conditionne l'eutrophisation, alors qu'en milieu marin, le facteur limitant est l'apport de nitrates.
Le phosphore est en effet un élément relativement rare dans la biosphère, par rapport à son importance chez les êtres vivants.
Il tend donc à être le facteur limitant principal de nombreux écosystèmes terrestres ou aquatiques.
Les sources de pollution des rivières par le phosphore sont
- les rejets directs de certaines industries : Industries agro-alimentaires, laveries, fabrication d'engrais, certaines industries chimiques
- les eaux usées domestiques : déchets du métabolisme et détergents
- les effluents agricoles : déjections animales et engrais. .
La pollution des eaux après leur épandage sur le sol est essentiellement dû au ruissellement et à l'érosion.
Une rivière non polluée renferme moins de 0,5 mg/l de phosphates
L'ion nitrate est entrainé en profondeur par la percolation mais une partie gagne aussi les eaux superficielles lors de ruissellement.
La surcharge en azote, de l'eau des rivières amène de grande quantité de nitrate sur le littoral. Dans les baies peu profondes, et lorsque la température et la luminosité sont suffisantes, cela favorise le développement d'algues vertes qui envahissent l'estran. Ce processus démarre à des teneurs dans l'eau bien inférieures à la référence de qualité de l'eau potable (50 mg/l). Pour le contenir, il faudrait retrouver dans les cours d'eau une concentration maximale de 10 à 25 mg/l selon les sites.
En Bretagne, cette prolifération est particulièrement notable dans les Côtes d'Armor, et dans une moindre mesure dans le Finistère. L'ampleur du phénomène dépend des conditions climatiques, et certaines années a conduit à la production de plus de 70 000 m3 d'algues.
Lorsque ces algues sont échouées sur la plage à marée basse, elles se décomposent et à l'intérieur du tas, en milieu anaérobie, il apparaît de l'hydrogène sulfuré qui est un gaz extrèmement toxique. Ce gaz a été à l'origine de la mort d'un cheval le 28 juillet 2009, car en marchant sur la masse d'algues en décomposition, il a libéré le gaz emprisonné. A partir d'une concentration dans l'atmosphère de plusieurs centaines de ppm, l'évolution est suraiguë; le cheval a perdu connaissance et a succombé aussitôt.
Pour lutter contre le phénomène d'eutrophisation du littoral, l'Etat a préparé un "Plan Algues Vertes", qui a été entériné par le Conseil des Ministres au début du mois de février 2010. Ce plan, qui représente un montant de 134 millions d'euros sur la période 2010-2014, a pour objectif de réduire les flux de nitrate en modifiant les pratiques agricoles et d'augmenter les moyens de ramassage et de traitement.
Le plan concerne 8 baies : En Côtes d'Armor, les Baies de la Fresnaye et de Saint Brieuc, la grève de Saint Michel, dans le Finistère, les anses de Locquirec, de l'Horn-Guillec et de Guisseny, et les baies de Douarnenez et de Concarneau. L'ensemble des 23 bassins versants concernés représente 3500 exploitations agricoles et 120 000ha de SAU (surface agricole utile).
Il comporte 3 volets
1°) Amélioration des connaissances et de la prévention des risques
- création d'un groupement de recherche pour approfondir les connaissances sur les conditions de prolifératation des algues et sur les possibilités de valorisation
- augmentation des mesures de protection et d'information des personnes
2°) Ramassage et traitement des algues
Intensification de la collecte et création de plateformes de compostage
3°) Prévention du phénomène
- réduction des flux de nutriments en provenance des installations de traitement des eaux usées et industrielles
- modification des pratiques agricoles :
* reconquête des zones humides et des prairies extensives, qui ont un pouvoir de dénitrification essentiel
* aide à l'évolution vers des systèmes de production à très basses fuites d'azote, avec mise en place d'un cahier des charges fixant les objectifs de résultat à atteindre
* développement des filières de méthanisation des lisiers excédentaires
* renforcement des contrôles du respect de la règlementation
Ce plan doit permettre à l'échéance 2015, une réduction de 30 à 40 % des flux de nitrate dans les 8 baies concernées.